Conférence

[TERMINÉ] La grotte Cosquer et les sociétés paléolithiques en Méditerranée

Lundi 21 novembre 2022
L'évènement est terminé.

Une rencontre avec l’archéologue préhistorien Jean-Pierre Bracco.

© MNHN

L’annonce de la découverte de la grotte Cosquer en 1991 a transformé profondément la vision du phénomène des grottes ornées. L’idée d’une répartition « franco-cantabrique », à l’ouest du Rhône, est dépassée, l’identification stricte à certaines cultures préhistoriques aussi. Pourtant, des découvertes antérieures en Italie étaient déjà connues, mais peu valorisées. Et depuis 1991, de nombreux travaux éclairent sous un nouveau jour les sociétés du Paléolithique supérieur en Méditerranée, leurs traditions techniques et leurs manifestations symboliques.

Professeur de Préhistoire à Aix-Marseille Université et membre du Laboratoire Méditerranéen de Préhistoire Europe-Afrique, Jean-Pierre Bracco travaille sur les sociétés paléolithiques des hommes anatomiquement modernes des rives nord et sud de la Méditerranée occidentale. Ses recherches portent sur l’organisation sociale et économique des populations de chasseurs-cueilleurs, leurs systèmes de mobilité et de gestion des ressources et leurs choix adaptatifs en fonction de la transformation des environnements dans le temps long. Il est membre de l’équipe scientifique de la grotte Cosquer.

En direct sur la chaîne YouTube du Musée de l’Homme

Posez toutes vos questions au chercheur jusqu'au 21 novembre. 

Lundi 21 novembre 2022 à 18 h - Durée : 1 h 30 - Dès 16 ans.
Rendez-vous à l'auditorium Jean Rouch.
Entrée libre et gratuite dans la limite des places disponibles.
Réservation conseillée sur billetterie.museedelhomme.fr.

Jean-Pierre Bracco vous répond

Q. :  Cette grotte est un vrai miracle et je pense qu'il faudrait de colossaux moyens pour la préserver et l'étudier. Si on arrivait à l'assécher par un barrage équipé d'un sas pour y accéder par tout temps. Questions : était-ce des pingouins ou des manchots ? (je sais qu'en anglais on appelle pingouins les manchots). On était juste avant l'ère glaciaire mais faisait-il froid entre 30 000 et 19 000 ans ? car si l'eau de la mer baisse du fait des glaciations, la grotte devait d'autant plus être accessible, une banquise à cette latitude-là serait surprenante mais je n'en sais rien. On dirait vraiment un endroit de culture et d'initiation.

J.-P. Bracco : Il y a plusieurs questions dans votre question ! Comme je l’ai dit lors de l’échange avec le public, il est hélas inenvisageable d’isoler la grotte du massif karstique et de la mer, les volumes, la multiplicité des échanges et les circulations d’air et d’eau sont trop importants et variés. 
En ce qui concerne l’espèce, il s’agit probablement du Grand Pingouin, espèce qui vivait non sur la banquise mais depuis la fin de la dernière période glaciaire, dans les eaux de l’Atlantique nord. Les conditions climatiques et environnementales au Paléolithique récent dans le nord de la Méditerranée lui convenaient donc. Espèce très chassée pour sa viande, le dernier Grand Pingouin fut tué en 1844 en Islande. 
Je ne sais pas si la grotte Cosquer fut « un endroit de culture et d’initiation » comme vous dites. Mais à l’instar de la grande majorité des grottes ornées, sa fréquentation est liée à la réalisation de pratiques symboliques, dont les images dessinées, peintes ou gravées en sont les vestiges. En tout cas, ces grottes ne sont pas des habitats. 

Q. : Concernant son niveau par rapport au sol : 37 mètres n'est pas le fond de la mer qui est plus bas.  Il y a - 27000 ans, l’entrée était-elle donc en hauteur sur la falaise, facilement accessible ?  L'accès ne pouvait-il pas se faire à un moment uniquement à l'aide d'embarcations ?  - 6000 l’entrée est inondée, mais cela devait faire longtemps que la mer était en dessous de l'ouverture... Merci.

J.-P. B. : Le boyau d’accès à la grotte Cosquer s’ouvre au pied d’une grande falaise dont la base est à - 37 mètres par rapport au niveau actuel de la mer. Donc, à l’époque de la fréquentation préhistorique, l’accès boyau est sans difficulté, il faut quand même se faufiler un peu car l’ouverture n’est pas très grande. En revanche, la progression ensuite sur plus de 150 m avec des éclairages portatifs de type torches et/ou lampe à graisse devait être plus compliquée ! Mais les plus de 400 grottes ornées connues montrent que la progression en milieu souterrain, complètement obscur, était maîtrisée par les sociétés du Paléolithique récent
C’est pendant l’Holocène ancien que l’eau vient submerger l’entrée du boyau, rendant la grotte inaccessible jusqu’à l’invention du scaphandre autonome !

Q. : Quel climat faisait-il à l'époque ?

J.-P. B. : L’ensemble de l’occupation préhistorique de la grotte Cosquer se situe au sein de la dernière période glaciaire, c’est-à-dire en climat froid. C’est pour cela que le niveau de la mer était beaucoup plus bas et que l’entrée aujourd’hui submergée était accessible. Toutefois, durant les plus de 10 000 ans de fréquentation de la grotte, (de 30 000 à 19 000 ans avant aujourd’hui), il y a bien sûr des variations climatiques – il fait toujours froid mais plus ou moins, l’humidité et les régimes de vents varient aussi – et le moment le plus froid se situe autour de 21 000 ans avant le présent. 

Autour de l’événement

Partenaires

Conférence en partenariat avec la société des Amis du musée de l’Homme.
Pour plus de renseignements sur les activités de la société des Amis du musée de l’Homme, rendez-vous sur www.samh.info ou par mail : samh@mnhn.fr.

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